mardi 5 avril 2016

Troyes - Les ruines de la Vacherie







EN 1885, un certain Douanier Rousseau déclenche l’hilarité générale au salon des Refusés, c’est tout dire ! Cette même année, arrive à Rothéneuf un Abbé Fourré, dont on ne peut, certes, mettre la foi en doute, mais qui se fera connaître surtout pour ses rochers sculptés. En 1879 avait commencé à Hauterives la construction d’un Palais Idéal édifié par un Facteur rural nommé Cheval. Or, aux alentours de 1885, un homme commence lui aussi à édifier une œuvre architecturale singulière. De ce site qui a sans doute égalé les plus grands, il ne reste aujourd’hui plus rien, presque plus rien. Cet homme s’appelait Auguste Bourgoin et il avait baptisé son site du beau nom de Ruines publiques fin de siècle !
L’aventure commence à Troyes où la famille Bourgoin exploite une gravière. Peu à peu, les quatre frère Bourgoin vont diversifier leur entreprise : ramassage des ordures, des gravats, des démolitions, transports en tous genres, récupérations…
Après quelques années de tâtonnements, l’un des frères, Auguste, commença en 1896, sur une parcelle de terrain qu’il possédait dans le quartier de la Vacherie à Troyes, à édifier des pyramides dans lesquelles il incluait des sculptures, des statuettes, des objets divers dont l’énumération formerait un inventaire à la Prévert ! Ces pyramides sont des constructions en pierre sèche, de base carré comportant des niches où l’on pouvait voir : Jeanne d’Arc, une Vénus, Napoléon Bonaparte, Garibaldi… Le site en comporta jusqu’à seize sans parler du Bureau des Ruines qui conservait les trouvailles les plus singulières !

Las, après un temps de célébrité autour de 1900, les tours furent détruites les unes après les autres… sauf une, la plus petite, qui résiste encore au milieu des habitations, le flanc bardé d’une plaque muette qui aurait dû contenir un poème « en l’Honneur du Site » !
Jean-François Maurice
Gazogène n°17


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Jean François Maurice nous a quittés le 6 mars 2014, entouré de sa famille et de quelques amis dans sa maison de Belaye, à la suite d’une grave maladie. Aujourd’hui nous adressons une pensée et un hommage à cet ami chaleureux à ce professeur de Philosophie apprécié de tous ses collègues, à cet artiste passionné, créateur en 1991 de la revue d’Art brut « Gazogène » Aujourd’hui trente cinq numéros prouvent une belle aventure, un exemple à part dans le monde de l’art brut. Elu au Conseil municipal de Belaye, il avait crée une association « Lire entre les vignes ». Il était connu à Cahors comme érudit, chercheur, collectionneur, amis des livres. On le rencontrait souvent au Salon du Livre Ancien où « Gazogène » en main il initiait avec simplicité et compétence tous ceux qui avaient soif de découvrir « L’art brut.» Jean François écrivait : « Gazogène a été crée pour laisser la parole à ceux qui en étaient exclus, pour signaler les manifestations de la création populaire, sans exclusive sans sectarisme. »
Les témoignages affluent
Jean Pierre Alaux : « Jean François Maurice appartenait à ces rares intellectuels qui propageaient leur savoir avec cette jubilation des êtres bienveillants, tolérants, foncièrement humanistes. Notre vieille amitié de plus de quarante ans ne fut qu’échanges, philosophie, curiosité et amour de la vie. Hédonistes nous étions, honorant dignement « Le sang de la vigne » Son regard émerveillé sur le monde va me manquer… Et dire qu’à présent il va philosopher avec le Grand Architecte cela promet de belles joutes oratoires aux portes du paradis.»
Jean Maureille : « J’ai eu la chance de côtoyer Jean- François, « il avait le don de mettre en valeur les « gens simples » de l’art brut ou de l’art singulier. Une poésie provocatrice ou drôle animait ses relations humaines ou ses écrits avec une érudition qu’il ne mettait jamais en avant respectant avec pudeur ses interlocuteurs. »
Laurent Guillault, conservateur en chef du Musée Henri Martin : « Grand spécialiste de l’art populaire, Jean François Maurice, amoureux des artistes vrais et des curieux, la revue « Gazogène » et son impressionnante documentation lui survivront. D’autres reprendront le flambeau mais sans son œil pétillant et sa barbe douce. Restent les souvenirs joyeux et les publications utiles dont le plus beau catalogue coédité avec le musée Henri Martin et consacré à Marie Espalieu en 2011. Jean François nous rappellera à son souvenir dès que nous verrons une racine ou une statue aux gros yeux, un lion à la crinière verte. Mais en attendant il nous manque déjà » 



publié par Le Petit Journal.  

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